Une forme unique de littérature
It’s as if we had the unassembled parts of a bicycle, and knew, through analogy (the shapes perhaps) that there was a relationship between the handles and our hands, the pedals and our feet, and so on. We may even have an idea that these are a necessary part of what is known as ‘a bike’ and of ‘riding a bike’ But to actually assemble the bike correctly, and then to be able to ride it, when and where to ride it, that requires contextual thinking: seeing each disparate part as part of a whole. That ‘whole,’ of course, expands with experience and understanding. A comprehensive study of Teaching Stories provides what is for all intents and purposes a limitless whole.”
Robert Ornstein, Teaching-Stories and the Brain, Library of Congress lecture, 2002
De The Psychology of Consciousness, par Robert Ornstein
Reproduit ici avec l'aimable autorisation de la succession de Robert Ornstein
Dans certaines cultures, notamment celles du Moyen-Orient, les histoires ou "contes de fées" occupent plusieurs fonctions. Ils peuvent à la fois amuser et divertir les jeunes. Souvent, ils peuvent contenir un message d’ordre moral utile et contribuer à instaurer un patrimoine culturel commun - un univers de discours partagé. Les contes préparent également le fondement d'un enseignement plus complet plus tard dans la vie.
La logique de ces histoires n'est pas ordinaire : elle s'apparente plutôt à celle du rêve. Dans les contes, le temps linéaire, par exemple, n'a que peu de valeur. Dans les contes de fées, les événements s’entremêlent - les uns dans, autour, avant, pendant et après les autres. Il existe même des tapis magiques qui peuvent transcender le temps. De nombreux symboles de ces contes de fées peuvent prendre une nouvelle signification si on les considère sous l'angle de la psychologie de la conscience. Je vous invite à y réfléchir un instant : un génie enfermé dans une bouteille, dont la libération peut signifier la destruction ; une princesse belle et difficilement inaccessible, emprisonnée dans une tour ; un dragon gardant un bijou précieux.
De nombreux livres d'histoires d'apparence tout à fait innocente, écrits pour étayer la psychologie ésotérique traditionnelle, mais sont souvent compris comme racontant des histoires littérales ou des faits divers. Il s'agit notamment des premiers récits des Fables d'Esope, des mythes grecs, des Mille et une nuits, de Don Quichotte, et de bien d'autres encore.
Ces histoires ont été nommées ‘histoires d’apprentissage’, car leur intention n'est pas seulement de procurer du plaisir ou de proposer une parabole utile, mais aussi de se connecter « à une partie de l'individu qui ne peut être atteinte par aucune autre convention » et d'établir « en lui ou en elle, un moyen de communication avec une vérité non verbale au-delà des limites habituelles de nos dimensions familières ». “with a part of the individual which cannot be reached by any other convention,” and establish “in him or in her, a means of communication with a nonverbalized truth beyond the customary limitations of our familiar dimensions.”
Comment ces récits peuvent-ils agir sur la conscience et communiquer de cette manière ? Pourquoi faut-il les lire et les relire sans cesse ? En gros, considérons que nous ne reconnaissons que ce qui nous est familier. Rappelons que nous pouvons reconnaître notre nom plus rapidement, et dit plus doucement que la plupart des autres mots que nous pouvons entendre. Nous pouvons reconnaître un mot dans notre propre langue plus rapidement qu'une séquence aléatoire de lettres. Nous voyons les six de cœur rouges beaucoup plus rapidement que les six de pique rouges.
Dans la tradition ésotérique l'objectif est bien sûr de recevoir de nouvelles informations. C’est à dessein que les histoires d’apprentissage contiennent une sélection de certains schémas d'événements. Lire l’histoire de façon répétitive permet le renforcement de ces schémas dans l'esprit du lecteur. Étant donné que de nombreux événements sont improbables et inhabituels, leur lecture amorce la création de nouveaux schémas mentales ou de nouveaux ‘organes de perception’, pour ainsi dire. Les histoires emmènent l'esprit sur des chemins inconnus et non linéaires. Il n'est donc pas nécessaire de les comprendre selon le mode intellectuel et rationnel usuel. Leur fréquente relecture incite la conscience à fonctionner d'une manière inhabituelle ; elle crée des schémas de fonctionnement ou des catégories qui sont disponibles lorsque certains événements extérieurs les provoquent. Cette habitude peut ouvrir la capacité de perception à des aspects de la réalité qui sont si insolites et inhabituels que l’individu n’aurait ni les concepts ni l’ouverture de l’esprit nécessaires pour les comprendre. Comme le dit T. S. Eliot, « ce n'est que par la forme, le ‘motif’, que les mots ou la musique atteignent le calme absolu ». Le génie de cette forme de littérature réside dans le fait que bien que l’analyse intellectuelle n'exploite pas l'histoire à fond, elle garde néanmoins une fonction ; cette forme de littérature se sert des deux modes d’appréhension.
Ces histoires sont transmises principalement par la tradition orale. Il est assez rare, à l'heure actuelle, dans notre culture, que l'on s'assoie pour écouter des histoires. Réfléchissez aux différences évidentes entre la lecture habituelle d'une œuvre littéraire et l’expérience de l’écoute. Lire à haute voix prend plus de temps et donne plus d'importance aux événements. L'écoute soulage nos yeux et notre système visuel et nous rééquilibre par nos oreilles. Écouter nous permet de nous représenter les événements tels qu'ils peuvent se dérouler dans l’espace. Certains de ces livres, en particulier les contes de fées, sont illustrés dans ce but précis. Enfin, l'écoute implique les sonorités de la langue et communiquer ainsi avec les zones tonalement sensibles du cerveau, grâce aux inflexions et aux harmoniques supérieures de la voix.
Le conteur lui-même est l'un des éléments les plus importants de ces traditions, car il utilise le langage pour contourner l'intellect verbal afin de toucher un mode de conscience qui n'est pas mobilisé par l'appareil habituel de la parole.
Une clé pour comprendre
Ces histoires particulières existent dans toutes les cultures, mais, comme beaucoup d'autres techniques psychologiques ésotériques, elles s'altèrent et dégénèrent en l'absence d'une certaine supervision. Il arrive que les gens croient que les histoires ont une valeur littérale ; elles doivent donc être reformulées pour chaque période culturelle, par une personne avertie ou une école à même de transmettre les nombreuses fonctions qu'une histoire peut remplir.
C'est le travail d'Idries Shah que de réintroduire ce matériel dans la culture occidentale contemporaine. Shah a voyagé pendant de nombreuses années sur plusieurs continents, à collecter et à comparer des histoires d’apprentissage traditionnelles.
Il est possible d’utiliser ces récits de multiples façons. Par exemple, elles peuvent servir de points de réflexion. Réflexion peut signifier à la fois ‘penser à’ (‘réfléchir’) et ‘refléter’. Souvent, une action décrite dans une histoire forme un modèle qui est également présent à un autre niveau de conscience, comme lorsqu'une photographie vue au microscope électronique contient une forme particulière qui peut être vue dans la photographie d'une rivière prise d'un avion, ou dans une image de la terre vue d'un satellite. C'est la signification de la formule ésotérique ‘Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas’.
Certaines histoires peuvent servir de modèles pour la conscience, de schémas immuables pour que nous puissions nous observer nous-mêmes. Dans l'une d'elles, Nasrudin souhaite apprendre à jouer du luth. Il cherche le maître du luth et lui demande : « Combien demandez-vous pour les leçons ? ». Le maître du luth répond : « Dix pièces d'or pour le premier mois, une pièce d'or pour les mois suivants.» « Excellent ! », dit Nasrudin. « Je commencerai par le deuxième mois ».
Certaines situations assez brèves et improbables peuvent être envisagées simultanément de différentes manières.
« Nasrudin se promenait dans la rue principale d'une ville, jetant des miettes de pain. Ses voisins lui demandèrent : Que fais-tu, Nasrudin ? ‘.
'J'éloigne les tigres'.
‘Il n'y a pas eu de tigres dans cette région depuis des centaines d'années.’
‘Exactement, c'est efficace, n'est-ce pas ?’
Ici, Nasrudin est à la fois le fou qui accomplit une action superstitieuse et inutile et le professeur de psychologie traditionnelle dont les actions peuvent être incompréhensibles pour la conscience ordinaire et linéaire.
Dans une autre histoire, Nasrudin est nommé magistrat. Lors de sa première affaire, le plaignant argumente de manière si convaincante qu'il s'exclame : « Je crois que vous avez raison. » “I believe you are right.”
Le greffier du tribunal le supplie de se retenir, car le défendeur n'avait pas été entendu.
Nasrudin est tellement emporté par l'éloquence du défendant qu'il s'écrie, dès que celui-ci a terminé sa déposition : « Je crois que vous avez raison ».
Le greffier ne peut le permettre. « Votre honneur, ils ne peuvent pas avoir raison tous les deux. »
"Je crois que vous avez raison », dit Nasrudin.
Cette histoire peut être considérée simultanément de plusieurs points de vue. Tout d'abord, Nasrudin représente la partie de nous qui s'accroche à toute nouvelle idée ou technique, s'enthousiasme et maintient sa valeur à l'exclusion des autres. Lorsque nous découvrons une nouvelle personne dans notre vie, un nouvel écrivain ou une nouvelle star de cinéma, il semble qu'elle ne puisse pas nous décevoir. Nos anciens amis et centres d'intérêt sont oubliés. À l'école, nous pouvons étudier la civilisation grecque et en venir à penser que les Grecs ont atteint le mode de vie idéal, puis nous pouvons étudier les Romains et penser qu'ils ont atteint le summum du développement humain. Cette même tendance peut exister au oeur d’une discipline, telle que la psychologie, où une idée - telle que le courant behaviouriste – et peut apparaître, offrant une technique nouvelle et utile, sur laquelle nous nous concentrons en nous focalisons totalement sur cette idée, oubliant les engagements, les intérêts et les valeurs antérieurs.
Deuxièmement, notez que Nasrudin est le juge dans cette histoire. Lorsque nous jugeons les autres, nous disons généralement (sous une forme ou une autre) : « Je pense que vous avez tort" ». Cela est évident dans les relations personnelles entre proches, ainsi que dans les arguments scientifiques. Deux universitaires, qui peuvent avoir des formations, des idées et des compétences tout à fait similaires, peuvent passer des années à se disputer sur un petit point technique et passer à côté de leurs nombreux accords essentiels. Deux églises peuvent présenter la même tendance. Notre éducation est également orientée vers la recherche de différences entre les choses et nous entraîne à analyser et à séparer autant que possible des événements qui sont perçus comme discordants. ‘Comparer et séparer...’ Nasrudin ouvre ici une alternative : mettre d'abord l'accent sur les points d'accord, puis, éventuellement, examiner les points de désaccord. differences between things, and trains us to analyze and separate different events as much as possible. “Compare and contrast …” Here Nasrudin is opening up the alternative: to emphasize the agreement first, then, perhaps, consider the points of disagreement.
Les aveugles et l'affaire de l'éléphant
Au-delà de Ghor, il y avait une ville. Tous ses habitants étaient aveugles. Un roi et son entourage arrivèrent dans les environs ; il amena son armée et campa dans le désert. Il possédait un éléphant puissant, qu'il utilisait pour l’attaque et pour susciter l'admiration du peuple.
La population était impatiente de connaître l'éléphant, et certains aveugles de cette communauté d’aveugles coururent stupidement pour le trouver.
Comme ils ne connaissaient même pas la forme de l'éléphant, ils avançaient à tâtons, recueillant des informations en touchant une partie de l'animal.
Chacun pensait savoir quelque chose, parce qu'il pouvait en toucher une partie.
Lorsqu'ils revinrent vers leurs concitoyens, des groupes enthousiastes se rassemblent autour d'eux, désireux, à tort, d'apprendre la vérité de la part de ceux quis’ étaient eux-mêmes égarés.
Ils posèrent des questions sur la forme de l'éléphant et écoutèrent tout ce qu'on leur disait.
L'homme dont la main avait atteint une oreille dit : ‘C'est une grande chose rugueuse, large, comme un tapis.’
Et celui qui avait touché la trompe a dit : ‘Je connais les faits réels. C'est comme un tuyau droit et creux, affreux et destructeur.’
Celui qui avait senti ses pieds et ses jambes disait : ‘Il est puissant et ferme, comme un pilier.’
Chacun avait senti une partie parmi d'autres. Chacun l'avait mal perçue.
Aucun esprit ne savait tout : la connaissance n'est pas le compagnon des aveugles. Tous ont imaginé quelque chose, quelque chose d'incorrect.
Le créé n'est pas informé de la divinité. Il n'y a pas de Voie dans cette science au moyen d’un intellect ordinaire.
Troisièmement, et cela rappelle l'histoire de l'éléphant citée plus haut, l'accusation et la défense peuvent avoir raison en même temps, tout comme un homme qui dit ‘ Il est cylindrique et solide ‘et un homme qui dit ‘il est long et flexible et émet de l'air’ sont tous deux corrects, lorsqu'on regarde l'éléphant dans son ensemble. Dans une telle perspective, de nombreux points de vue qui pourraient sembler opposés peuvent être considérés comme complémentaires. En psychologie, ces points de vue pourraient être les suivants : ‘la conscience est individuelle’, ‘la conscience est cosmique’, ‘nous comprenons immédiatement, par le langage’, ‘nous comprenons immédiatement, par l'intuition’. Au fur et à mesure que nos connaissances scientifiques et personnelles se développent, nous pouvons acquérir une certaine perspective et être en mesure de réconcilier des points de vue qui, auparavant, pouvaient sembler opposés.
Une histoire très célèbre de Nasrudin s'ouvre sur un homme qui regarde Nasrudin en train de chercher sur le sol.
L'homme lui demande : « Qu'avez-vous perdu, Mulla ? »
« Ma clé », répond le Mulla
Ils se mirent tous deux à genoux et la cherchèrent. Au bout d'un moment, l'homme demanda : « Où l'as-tu laissée tomber ? »
« Dans ma propre maison. »
« Alors pourquoi cherches-tu ici ? »
« Il y a plus de lumière ici que dans ma propre maison. »
Bien que cette histoire soit drôle (elle a été jouée sur scène en tant que telle), elle présente une morale superficielle évidente.
Mais nous pouvons travailler un peu avec l'histoire et ouvrir certains aspects plus profonds. Je vous invite à passer un peu de temps avec cette histoire et à la relire plusieurs fois. Ensuite, fermez les yeux et imaginez-vous en train de chercher frénétiquement quelque chose.
- Que cherchez-vous ?
- Où cherchez-vous ?
- Y a-t-il beaucoup de lumière à cet endroit ?
- Une fois que vous avez fait cela, fermez à nouveau les yeux et imaginez une clé.
- Quelle est votre clé (prenez votre temps) ?
- Qu'est-ce qui vous vient à l'esprit ?
Après avoir passé un certain temps sur la clé, dites-vous : « J'ai perdu ma clé » et voyez où cela vous mène.
Ensuite, passez un peu de temps sur l’idée : « Ma clé est dans ma propre maison ». Notez où vont vos pensées.
Puis reconstituez l'ensemble de l'histoire : « Je cherche ma clé - que je sais être dans ma propre maison - dans des endroits où je sais que la clé n'est pas, mais où il y a plus de lumière » et passez un peu plus de temps avec l'histoire. C'est un endroit bon à visiter ».
Outre les associations personnelles évoquées par l'histoire, j'en propose une autre, plus directement liée aux préoccupations de ce livre. Deux zones de l'esprit s'opposent, la lumière ou le jour, et l'obscurité ou la nuit. La clé se trouve à l'intérieur de la maison, dans la zone sombre et inexplorée de notre maison, de notre esprit ou de la science. Nous sommes normalement attirés et un peu éblouis par la lumière du jour, car il est généralement plus facile de trouver des objets à la lumière du jour. Mais ce que nous cherchons peut, tout simplement, ne pas se trouver là, et nous devons souvent tâtonner quelque peu dans les zones sombres pour le trouver. Une fois que nous avons trouvé ce que nous cherchions dans l'obscurité, nous pouvons l'amener à la lumière et créer une synthèse des deux zones de l'esprit.
‘Mourir avant de mourir ‘
Attribué au prophète Mahomet Muhammad
Toutes les histoires soufies ne concernent pas Nasrudin : ‘Les fourmis et le stylo’.
Un jour, une fourmi tomba sur une feuille de papier et vit un stylo qui écrivait à petits traits noirs.
« Comme c'est merveilleux ! » dit la fourmi. « Cette chose remarquable, dotée d'une vie propre, fait des gribouillis sur cette belle surface, avec une telle ampleur et une telle énergie qu'elle égale les efforts de toutes les fourmis du monde. Et les gribouillis qu'elle fait ! Ils ressemblent à des fourmis, pas une, mais des millions, qui courent toutes ensemble" »
Il répète ses idées à une autre fourmi, qui est tout aussi intéressée. Elle loue le sens de l'observation et de la réflexion de la première fourmi.
Mais une autre fourmi dit : « Profitant, il faut l'avouer, de vos efforts, j'ai observé cet étrange objet. Mais j'ai constaté qu'il n'est pas le maître d'œuvre de ce travail. Tu n'as pas remarqué que ce stylo est attaché à d'autres objets qui l'entourent et l'entraînent dans sa course. C'est à eux qu'il faut attribuer le mérite du mouvement. » C'est ainsi que les fourmis ont découvert les doigts.
Mais une autre fourmi, après un long moment, grimpa sur les doigts et se rendit compte qu'ils formaient une main, qu'elle explora minutieusement, à la manière des fourmis, en se précipitant dessus.
Il revint vers ses congénères : « Fourmis, s'écria-t-il, j'ai une nouvelle importante à vous annoncer. Ces petits objets font partie d'un grand. C'est ce dernier qui leur donne le mouvement. »
Mais on découvrit alors que la main était attachée à un bras, et le bras à un corps, et qu'il y avait des pieds qui n'écrivaient pas.
Les recherches se poursuivent. Les fourmis ont une idée assez précise de la mécanique de l'écriture. Quant au sens et l'intention de l'écriture, ainsi que la manière dont elle est finalement contrôlée, elles ne les découvriront pas par leur méthode d'investigation habituelle. Parce qu'elles sont alphabétisées.
Ici, le mode linéaire et cumulatif de collecte des connaissances est à nouveau opposé à un mode holistique et tacite qui ne peut apparaître que lorsque la conscience est organisée différemment. Cette histoire met l'accent sur les forces et les limites du mode ordinaire et sur la nécessité d'opérer dans un mode approprié au type de connaissance que l'on recherche. Les fourmis, se croyant déjà alphabétisées, s'interdisent en effet toute compréhension possible du sens de l'écriture.
Pour faire le lien avec la recherche scientifique, nous pourrions essayer de déterminer, par exemple, les habitudes de vote d'une personne en examinant chaque cellule de son corps et en faisant le total de ces observations chimiques et électro-physiologiques d'une manière limitée à l’addition et au cumul. Cette méthode serait non seulement fastidieuse et coûteuse, mais il est presque certain qu'elle ne permettrait pas d'obtenir une réponse appropriée (en tout cas pas avant les prochaines élections*). Un niveau d'analyse plus approprié pour cette situation serait le niveau sociologique, plutôt que le niveau biologique. Nous tenterions alors de considérer cette personne dans son ensemble, telle qu'elle existe dans le contexte social, et nous ignorerions commodément, aux fins de cette analyse, qu'elle est composée de milliards de cellules individuelles discrètes.
À ce niveau d'analyse supérieur, nous prendrions en considération des facteurs plus pertinents pour la question posée, tels que le revenu ou la situation familiale de la personne. Il ne nous viendrait jamais à l'esprit de demander ‘Quel est le revenu de cette cellule ?’. Dans l'histoire des fourmis, pour qu'elles comprennent pleinement la nature et la signification de l'écriture, leur niveau d'analyse lui-même devrait être élargi. Mais, tout comme les niveaux d'analyse biologique et sociologique peuvent coexister simultanément, la conscience personnelle, individuelle, peut coexister avec une autre que l'on appelle souvent la conscience objective ou cosmique. Les pratiques ésotériques tentent de supprimer temporairement la conscience individuelle, analytique (représentée ici comme le fait de regarder chaque cellule séparément), et de permettre à l’émergence de la conscience de l'organisme entier.
Nombreux sont ceux qui sont devenus confus à ce stade, croyant qu'il s'agissait d'une question de type ‘ou bien, ou bien’, croyant en l'existence d'un seul mode. Cependant, l'existence d'une conscience individuelle et séparée n'exclut pas la possibilité de la coexistence simultanée d'un autre niveau d'organisation. De même que l'existence de la société ne nie pas l'existence de l'individu, de même l'existence dans le corps de milliards de cellules individuelles, en tant qu'unités séparées, discrètes et analysables, n'exclut pas l'existence d'une personne émergente, entière, dont les propriétés ne peuvent être attribuées à aucune combinaison linéaire de cellules.
Ce niveau de conscience supérieur est souvent appelé l'expérience mystique, la perception de l'unité, de ‘Nous sommes tous un’. Cette affirmation ne signifie pas que ‘nous sommes tous la même chose et exactement pareils’, comme on l'interprète parfois. Elle signifie plutôt que les personnes sont toutes des composantes individuelles d'un niveau émergent d'organisation, et que ce niveau, cette organisation, peut devenir perceptible de la même manière que la somme des cellules d'un corps sont individuelles, mais constituent une seule personne.
Le passage de la conscience individuelle et analytique à un mode holistique, provoqué par l'entraînement du côté intuitif de nous-mêmes, est souvent désigné par un terme qui se traduit par ‘la mort de l'ego’ dans la tradition ésotérique. Ce changement consiste à briser les constructions qui maintiennent la conscience personnelle et à passer de ce mode analytique au mode émergent de la conscience gestaltiste.
Existe-t-il un nombre supérieur à 100 ?
Un homme, ayant pillé une ville, essaya de vendre l'un de ses butins, un tapis exquis. « Qui me donnera 100 pièces d'or pour ce tapis ? » s'écria-t-il dans toute la ville.
Après la transaction, un camarade s’approcha du vendeur, et lui demanda :
« Pourquoi tu n’as pas demandé plus pour ce tapis précieux ? »
« Y a-t-il un nombre plus grand que 100 ? » demanda le vendeur.
Voir double
Un père dit à son fils qui voit double : « Mon fils, tu vois deux choses au lieu d'une ».
« Comment cela se fait-il ? » répondit le garçon. « Si c'était le cas, il semblerait qu'il y ait quatre lunes là-haut au lieu de deux. »
La conscience est sélective et limitée. Les concepts du possible limitent la conscience personnelle et la pensée scientifique. Nous nous demandons constamment s'il existe un nombre supérieur à 100. Nous limitons notre conscience et nos possibilités. Une grande partie de la journée, nous agissons comme le fils qui voit double et confondons notre construction personnelle avec la réalité extérieure.
On ne sait jamais quand cela peut être utile
Nasrudin emmenait parfois des gens en voyage sur son bateau. Un jour, un pédagogue pointilleux l'engagea pour lui faire traverser une rivière très large.
Dès qu'ils furent à flot, l'érudit demanda si la rivière allait être agitée.
Nasrudin répondit : « Ne me demandez pas rien à ce sujet. »
« N'as-tu jamais étudié la grammaire ? »
« Non », répondit le Mulla.
« Dans ce cas, tu as perdu la moitié de ta vie. »
Le Mulla ne dit rien.
Bientôt, une terrible tempête éclata. La coque folle du Mulla se remplit d'eau. Il se pencha vers son compagnon.
« As-tu déjà appris à nager ? »
« Non », répondit le pédant.
« Dans ce cas, maître d'école, vous avez perdu la vie, car nous sommes en train de couler. »
Un deuxième mode de conscience
Il existe un second mode de conscience qui se manifeste à de nombreux niveaux - culturel, personnel et biologique.
Au niveau biologique, deux hémisphères cérébraux du cortex sont spécialisés dans des modes différents de traitement de l'information. L'hémisphère gauche fonctionne principalement sur le mode verbal et séquentiel ; l'hémisphère droit sur le mode spatial et simultané. Ce mode de l'hémisphère droit est souvent dévalorisé par l'intellect verbal dominant. Puisque vous n'avez pas appris la grammaire, « vous avez perdu la moitié de votre vie », disait le pédagogue au batelier. Ce deuxième mode apparaît souvent inélégant, sans raisonnement formel ni polissage de l'intellect. Il est plus impliqué dans l'espace que dans le temps, plus impliqué dans l'intuition que dans la logique et le langage.
C'est un mode souvent oublié et ignoré, en particulier au sein de la communauté scientifique, mais qui peut s'avérer important pour la science, voire pour notre propre survie. « Avez-vous déjà appris à nager ? » demande le batelier au pédagogue. Parce qu'il est non linéaire, ce second mode n'est pas impliqué dans le domaine ordinaire de la cause et de l'effet qui sous-tend une grande partie de notre vie personnelle et intellectuelle. Il s'agit d'un mode dans lequel toutes les occurrences existent en tant qu'un ensemble structuré, comme dans le dessin qui accompagne cette histoire :
Un moment dans le temps
« Qu'est-ce que le destin ? » demanda un érudit à Nasrudin.
« Une succession sans fin d'événements entrelacés, chacun influençant l'autre. »
« Ce n'est pas une réponse satisfaisante. Je crois à la cause et à l'effet. » effect.”
« Très bien », dit le Mulla, « regardez cela ». Il désigna un cortège qui passait dans la rue.
« Cet homme est emmené pour être pendu. Est-ce parce que quelqu'un lui a donné une pièce d'argent et lui a permis d'acheter le couteau avec lequel il a commis le meurtre, ou parce que quelqu'un l'a vu faire, ou parce que personne ne l'a arrêté ? »
Les deux grands courants de psychologie ont chacun étudié de manière prédominante un mode de conscience humaine. La science moderne est essentiellement verbale et logique ; les traditions ésotériques se sont spécialisées dans le mode holistique tacite, largement inaccessible au langage et à la raison. Ces deux modes sont représentés dans l'histoire des aveugles et de l'éléphant. L'un des modes de conscience s'approche de l'éléphant par une investigation fragmentaire ; l'autre tente de développer une perspective de l'organisme dans son ensemble.
L'homme qui marchait sur l'eau
Un derviche à l'esprit conventionnel, issu d'une école austèrement pieuse, se promenait un jour au bord d'une rivière. Il était absorbé par la concentration sur des problèmes moraux et scolaires, car c'était la forme que l'enseignement soufi avait prise dans la communauté à laquelle il appartenait. Il assimilait la religion émotionnelle à la recherche de la vérité ultime.
Soudain, ses pensées sont interrompues par un grand cri : Quelqu'un répétait l'appel des derviches. « Cela ne sert à rien, se dit-il, car l'homme prononce mal les syllabes. Au lieu d'entonner « YA HU », il dit « U YA HU ».
Il réalisa alors qu'il avait le devoir, en tant qu'étudiant plus attentif, de corriger ce malheureux, qui n'avait peut-être pas l'occasion d'être guidé correctement, et qui ne faisait donc probablement que son possible pour s'accorder à l'idée qui se cachait derrière les sons.
Il loua donc un bateau et se rendit sur l'île au milieu du courant d'où semblait provenir le son. Il y trouva un homme assis dans une hutte de roseaux, vêtu d'une robe de derviche, qui bougeait au rythme de sa propre répétition de la phrase initiatique. « Mon ami, dit le premier derviche, tu prononces mal la phrase. Il m'incombe de te le dire, car il y a du mérite pour celui qui donne et pour celui qui prend conseil. C'est ainsi que tu la prononces", et il le lui dit.
« Merci », dit humblement l'autre derviche.
Le premier derviche remonta dans son bateau, plein de satisfaction d'avoir fait une bonne action. Après tout, on disait qu'un homme capable de répéter correctement la formule sacrée pouvait même marcher sur les vagues : une chose qu'il n'avait jamais vue, mais qu'il avait toujours espéré - pour une raison ou pour une autre - pouvoir réaliser.
Il n'entendait plus rien de la hutte de roseaux, mais il était sûr que sa leçon avait été bien comprise. Il entendit alors un U YA hésitant, tandis que le second derviche commençait à répéter la phrase à son ancienne manière.
Alors que le premier derviche pensait à cela, réfléchissant à la perversité de l'humanité et à sa persistance dans l'erreur, il vit soudain un spectacle étrange. De l'île, l'autre derviche venait vers lui, marchant à la surface de l'eau.
Stupéfait, il s'arrête de ramer. Le second derviche s'approcha de lui et lui dit : « Frère, je suis désolé de te déranger, mais je suis sorti pour te redemander la méthode standard pour faire la répétition que tu me disais, car j'ai du mal à m'en souvenir ».
On pense souvent que les techniques de ces traditions ésotériques impliquent un entraînement délibérément exotique et mystérieux, comme l'utilisation de mots magiques spéciaux et mystérieux dans la méditation. Cependant, l'essence de la méditation est la concentration de la conscience sur une source de stimulation unique et immuable. C'est l'attitude, et non la forme spécifique, qui est primordiale. Si l'exercice est effectué correctement, un nouvel ensemble de capacités peut émerger, comme le montre symboliquement ‘ L'homme qui marchait sur l'eau’. Les techniques de méditation, les exercices de désaccoutumance et d'autres exercices spéciaux sont conçus pour provoquer un passage de la conscience analytique ordinaire à la conscience holistique.
Nasrudin est entré dans un magasin et a demandé au commerçant : « Avez-vous du cuir ? ».
« Oui », répondit le commerçant.
« Des clous ? ». « Oui. »
« Du fil ? ». « Oui. »
« Des aiguilles ? ». « Oui. »
« Alors pourquoi ne te fais-tu pas une paire de bottes ? »
Nous ne réalisons pas souvent que nous possédons les différentes pièces d'une conscience complète, jusqu'à ce que Nasrudin, dans son rôle, nous le fasse remarquer. En tant que guide, il peut demander : « Pourquoi ne fabriquez-vous pas une paire de bottes avec le matériau dont vous disposez ? ». Et pourtant, comme Mulla Nasrudin, nous avons souvent cherché la clé de notre compréhension au grand jour. Mais elle n'est peut-être pas là. Elle se trouve à l'intérieur, dans notre côté obscur, un côté souvent oublié parce qu'« il y a plus de lumière ici-même ».
Le sultan qui devint un exilé
On raconte qu'un sultan d'Égypte convoqua une conférence d'érudits et que, très vite, comme c'est généralement le cas, un différend s'éleva. Le sujet était le voyage nocturne du prophète Mahomet. On dit qu'à cette occasion, le prophète a été transporté de son lit dans les sphères célestes. Au cours de cette période, il vit le paradis et l'enfer, s'entretint avec Dieu 90 000 fois, vécut de nombreuses autres expériences et fut ramené dans sa chambre alors que son lit était encore chaud. Un pot d'eau qui avait été renversé par le vol et s'était répandu n'était toujours pas vide lorsque le prophète revint.
Certains pensaient que c'était possible, en mesurant le temps différemment. Le sultan affirmait que c'était impossible.
Les sages affirmaient que tout était possible à la puissance divine.
Cela ne satisfaisait pas le roi.
La nouvelle de ce conflit parvint au cheikh soufi Shahabudin, qui se présenta immédiatement à la cour. Le sultan fit preuve de l'humilité nécessaire à l'égard du maître, qui lui dit : « J'ai l'intention de procéder sans plus attendre : J'ai l'intention de procéder sans plus tarder à ma démonstration, car je sais maintenant que les deux interprétations du problème sont incorrectes et qu'il existe des facteurs démontrables qui peuvent expliquer les traditions sans qu'il soit nécessaire de recourir à une spéculation grossière ou à une ‘logique’ insipide et mal informée ».
La salle d'audience comportait quatre fenêtres. Le cheikh ordonna d'en ouvrir une. Le sultan regarda par cette fenêtre. Sur une montagne, il vit une armée d'invasion, une myriade, s'approcher du palais. Il eut terriblement peur.
« Oubliez cela, car ce n'est rien », dit le cheikh.
Il ferma la fenêtre et la rouvrit. Cette fois, il n'y avait pas âme qui vive.
Lorsqu'il ouvrit une autre fenêtre, il vit la ville à l'extérieur en proie aux flammes. Le sultan poussa un cri d'alarme.
« Ne vous inquiétez pas, sultan, car ce n'est rien », dit le cheikh. Lorsqu'il referma et rouvrit la fenêtre, il n'y avait plus de feu.
La troisième fenêtre ouverte révéla une inondation qui s'approchait du palais.
Là encore, il n'y avait pas d'inondation.
Lorsque la quatrième fenêtre fut ouverte, au lieu du désert habituel, un jardin paradisiaque apparut - puis, en refermant la fenêtre, la scène disparut comme auparavant.
Le cheikh ordonna alors qu'on apporte un récipient d'eau et que le sultan y plonge la tête un instant. Dès qu'il l'eut fait, le sultan se retrouva seul au bord d'une mer déserte, dans un endroit qu'il ne connaissait pas.
Par ce sort magique du cheikh perfide, il fut transporté de fureur et jura de se venger.
Il rencontra bientôt des bûcherons qui lui demandèrent qui il était.
Incapable d'expliquer son véritable état, il leur dit qu'il a fait naufrage.
Ils lui donnèrent quelques vêtements et il marcha jusqu'à une ville où un forgeron, le voyant errer sans but, lui demanda qui il était. « Un marchand naufragé, dépendant de la charité des bûcherons, maintenant sans ressources », répondit le sultan.
L'homme lui parle alors d'une coutume de son pays. Tout nouvel arrivant pouvait demander à la première femme qui sortait du bain de l'épouser, et elle était obligée de le faire. Il se rendit au bain et vit une belle jeune fille en sortir. Il lui demanda si elle était déjà mariée : elle l'était, et il dut donc demander à la suivante, une laide. Et encore une autre. La quatrième était vraiment ravissante. Elle répondit qu'elle n'était pas mariée, mais passa devant lui, vexée par son apparence et sa tenue misérables.
Soudain, un homme se présenta devant lui et dit : « On m'a envoyé chercher un homme en guenilles. Veuillez me suivre. »
Le sultan suivit le serviteur et fut introduit dans une maison merveilleuse dans l'un des somptueux appartements où il resta assis pendant des heures. Enfin, quatre belles femmes magnifiquement vêtues entrèrent, précédées d'une cinquième, encore plus belle. Le sultan la reconnut comme étant la dernière femme qu'il avait abordée au bain.
Elle lui souhaita la bienvenue et lui expliqua qu'elle s'était dépêchée de rentrer chez elle pour préparer sa venue, et que sa hauteur n'était qu'une des coutumes du pays, pratiquée par toutes les femmes dans la rue.
Suit un magnifique repas. Des robes magnifiques sont apportées et remises au sultan, tandis qu'une musique délicate est jouée.
Le sultan resta sept ans avec sa nouvelle épouse, jusqu'à ce qu'ils aient dilapidé tout son patrimoine. La femme lui dit alors qu'il doit maintenant subvenir à ses besoins et à ceux de leurs sept fils.
Se souvenant de son premier ami dans la ville, le sultan retourna voir le forgeron pour lui demander conseil. Comme le sultan n'avait ni métier ni formation, on lui conseilla d'aller sur la place du marché et de proposer ses services en tant que porteur.
En une journée, il ne gagna, en portant une terrible charge, qu'un dixième de l'argent nécessaire à la nourriture de la famille.
Le lendemain, le sultan se rendit à nouveau au bord de la mer, où il retrouva l'endroit même d'où il était sorti sept longues années auparavant. Décidé à faire ses prières, il commença à se laver dans l'eau ; il se retrouva soudainement et dramatiquement au palais, avec le récipient d'eau, le cheikh et ses courtisans.
« Sept ans d'exil, méchant homme ! » rugit le sultan. « Sept ans, une famille et l'obligation d'être porteur ! Ne crains-tu pas Dieu, le Tout-Puissant, pour cet acte ? »
« Mais il n'y a qu'un instant », dit le maître soufi, « depuis que tu as mis ta tête dans l'eau. »
Ses courtisans confirment cette affirmation. Le sultan ne pouvait se résoudre à en croire un mot. Il commença à donner l'ordre de décapiter le cheikh.
Percevant intérieurement que cela allait se produire, le cheikh exerça la capacité appelée Ilm el-Ghaibat, la science de l'absence : la science de l'absence.
Il fut alors instantanément et corporellement transporté à Damas, à plusieurs jours de distance. De là, il écrivit une lettre au roi :
« Sept années se sont écoulées pour vous, comme vous l'avez découvert, pendant que vous aviez la tête dans l'eau. Cela se produit par l'exercice de certaines facultés et n'a pas de signification particulière, si ce n'est d'illustrer ce qui peut se produire. Le lit n'était-il pas chaud, la jarre d'eau n'était-elle pas vide dans la tradition ? »
« Ce n'est pas le fait qu'une chose se soit produite ou non qui est l'élément important. Tout peut arriver. Ce qui est important, en revanche, c'est la signification de l'événement. Dans votre cas, il n'y a pas eu de signification. Dans le cas du Prophète, l'événement avait une signification ».
Lorsque la conscience est modifiée, beaucoup commencent à vénérer des expériences ou des états. Pourtant, ces expériences peuvent se produire et rester dénuées de sens, comme ce fut le cas pour le sultan en exil. Puisque nous construisons notre monde ordinaire à partir des données limitées de nos systèmes sensoriels, nous restons largement inconscients d'une grande partie de notre environnement immédiat, soit parce que nous n'avons pas les organes réceptifs, soit parce que les phénomènes changent lentement. Mais si les poissons ne sont pas conscients du milieu dans lequel ils vivent, nous ne sommes pas obligés d'ignorer notre propre océan géophysique. Sous certaines conditions, cette prise de conscience globale supplémentaire peut être développée.
S'adapter au monde moderne
La nature de la conscience humaine et notre capacité à nous adapter au monde moderne suscitent actuellement de vives inquiétudes. Nombreux sont ceux qui estiment que le développement de leur propre conscience est une priorité absolue, car l'homme dispose désormais d'une capacité de contrôle et de manipulation de la terre considérablement accrue, qui dépasse de loin tout ce que nous avons pu connaître au cours des longs millénaires de notre évolution biologique. La destruction de la terre entière n'est plus une impossibilité. Dans cette optique, il n'y a peut-être plus d'évolution biologique humaine sans évolution consciente, comme on l'appelle souvent.
Nasrudin nous permet de voir notre situation dans ce conte moderne, à travers le prisme de l'humour, résumant une grande partie de ce que l'on sait sur l'inflexibilité de la conscience humaine normale et la nécessité actuelle de changer de mode de pensée. Nasrudin prend l'avion d'un pays du Moyen-Orient pour se rendre à Londres avec ses nombreux disciples. Le quadrimoteur décolle et tout se passe bien pendant un certain temps. Puis un moteur tombe en panne et le commandant de bord déclare : « Ne vous inquiétez pas, nous arriverons à Londres avec une demi-heure de retard. » Tout le monde reste calme. Le deuxième moteur tombe en panne et les ouailles de Nasrudin s'inquiètent. Le capitaine dit qu'ils auront deux heures de retard. Nasrudin est apaisé, tout va bien. Puis le troisième moteur tombe en panne et le commandant de bord annonce que l'avion va brimbaler et qu'il aura plusieurs heures de retard sur sa destination. Nasrudin, dans cette histoire, la fontaine de la pensée conventionnelle, dit : “Do not worry, we will be late into London, by a half hour.” Everyone is calm. The second engine fails, and Nasrudin’s flock gets worried. The captain says that they will be two hours late. Nasrudin is soothing, everything is all right. Then the third engine fails, and the captain says that the plane will limp along and will be several hours late to the destination. Nasrudin, in this story the fountain of conventional thinking, says:
« Prions que le quatrième moteur ne tombe pas en panne, car si cela arrivait, nous passerions toute la journée dans le ciel !».
Cette réimpression contient les histoires d'enseignement suivantes de l'éducateur et savant Idries Shah, incluses ici avec l'aimable autorisation de la Fondation Idries Shah :
Extraits dont "See What I Mean ?" (Vous voyez ce que je veux dire ?) Moment in Time (Un moment dans le temps) et "There Is More Light Here" (Il y a plus de lumière ici ), tirés de The Exploits of the Incomparable Mulla Nasrudin, (Les exploits de l’incomparable Nasrudin) par Idries Shah.
Extraits dont The High Cost of Learning (Le coût élevé de l’instruction,) tires de I Believe You Are Right ! (Je crois que vous avez raison) et Why Don't You ? (Pourquoi vous ne le feriez pas ?) tirés de The Pleasantries of the Incredible Mulla Nasrudin (Les bons Mots de l’Incroyable Nasrudin), par Idries Shah.
Extraits de « The Sultan who became an Exile"(Le sultan qui devint un exilé"), The Man who walked on water, ("L'homme qui marchait sur l'eau") et The Blind Men and the Elephant (Les aveugles et l'éléphant) tirés des Tales of the Dervishes, (Les contes derviches) d'Idries Shah.
Seeing double,(Voir double) et The Ants and the pen (Les fourmis et le stylo), extraits de The Caravan of dreams ( La caravane des rêves), par Idries Shah.